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Le groupe pharmaceutique Ipsen multiplie les accords de recherche avec l'Inserm et le CEA

A l'approche d'une entrée en Bourse, l'entreprise a mis en avant le dynamisme de sa recherche

Yves Mamou, Le Monde, 26 septembre 2005

APRÈS avoir été longtemps négligés, les partenariats entre le privé et le public se multiplient. Vendredi 23 septembre à Paris, Jean-Luc Belingard, PDG du laboratoire pharmaceutique Ipsen, Christian Brechot, directeur général de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), et André Syrota, directeur des sciences du vivant au Commissariat à l'énergie atomique (CEA), avaient réuni la presse pour insister sur l'importance de ces partenariats. Selon eux, la position de la France dans la recherche mondiale et la place de l'industrie pharmaceutique française dans la compétition internationale dépendent pour partie de la capacité de la recherche fondamentale publique à travailler en harmonie avec la recherche privée. Pour Ipsen, laboratoire de taille moyenne qui investit chaque année environ 20 % de son chiffre d'affaires en recherche appliquée (147,4 millions d'euros en 2004, soit + 8,2 % par rapport à 2003), il n'était pas inutile de rappeler aux investisseurs le dynamisme de sa recherche et la liste des partenariats déjà noués aussi bien avec des laboratoires publics qu'avec de grands groupes pharmaceutiques privés. D'autant que l'entreprise prépare activement son entrée en Bourse, laquelle pourrait avoir lieu avant la fin 2005."Au total, 28 projets de recherche en partenariat sont en cours, ou en voie d'être finalisés, avec des partenaires publics ou privés , a expliqué M. Belingard. Parmi eux six projets sont en partenariat avec le CEA et trois avec l'Inserm."

Pour le CEA, cette célébration des partenariats public-privé (PPP) était l'occasion de rappeler l'ancienneté de sa présence dans la recherche biologique à travers ses plates-formes sophistiquées d'imagerie médicale. Les technologies issues du nucléaire ont en effet permis la mise au point d'outils nouveaux capables d'appréhender la structure du vivant jusque dans ses éléments les plus infimes. Avec l'Inserm, Ipsen développe plusieurs types de collaboration, dont un programme de recherche considéré comme majeur : il concerne le développement d'une molécule qui pourrait s'avérer efficace contre le cancer du sein et celui de la prostate. MM. Belingard, Brechot et Syrota se sont employés à réduire le scepticisme sur les capacités du secteur public à travailler selon les critères du privé. M. Brechot a défendu ardemment le niveau scientifique des recherches menées à l'Inserm. Mais " là où nous sommes défaillants , a-t-il reconnu, c'est dans notre capacité à amener des projets de recherche aux industriels à une étape où ces projets présentent des preuves d'un début d'efficacité thérapeutiqu e". Ce qu'aux Etats-Unis on appelle la "preuve du concept" (proof of concept).

CONFLIT CULTUREL

L'Inserm a ainsi créé une filiale Inserm-Transfert chargée de "manager des projets" avec différents acteurs du privé. Bien qu'Ipsen et l'Inserm aient des profils très différents, le but est d'arriver à bâtir un " continuum de transfert technologique qui va des premiers partenariats de recherche aux premières démonstrations d'efficacité" . Ces associations public-privé bénéficient aujourd'hui d'un environnement favorable dû à la naissance d'une Agence nationale de la recherche (ANR) et de la mise en place de pôles de compétitivité, dont l'un est spécialisé sur les sciences du vivant : Meditech Santé en Ile-de-France. MM. Syrota et Brechot ont également profité de l'occasion pour combattre l'idée qu'il pouvait exister un conflit culturel entre la recherche publique et la recherche privée. "On a lutté pendant des années pour que des brevets soient déposés avant publication de travaux académiques. Cela pour éviter d'être pillés. Mais aujourd'hui, c'est le problème inverse, chaque thésard est persuadé qu'il a entre les mains la possibilité de créer une "start up "", a dit M. Brechot. M. Syrota a confirmé de son côté que l'esprit entrepreneurial marquait des points dans la recherche publique. Si le splendide isolement de la recherche publique s'efface progressivement, de nombreux problèmes demeurent : à commencer par la difficulté du public à offrir des carrières dignes de ce nom aux jeunes chercheurs issus de l'université.